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Né dans une famille d’enseignants, Lehman découvre la science-fiction à l’âge de dix ans, expérience qui constitue selon lui une révélation et une compensation symbolique au divorce de ses parents. Adolescent « humanoïde », fasciné par les revues Strange et Métal Hurlant et par des auteurs comme Philip K. Dick ou Michel Jeury, il est encore élève au Lycée J.-B. Corot de Savigny-sur-Orge lorsqu’il commence à publier, dans les fanzines, des nouvelles et des histoires courtes en bande dessinée ; il crée aussi l’une des premières émissions consacrées aux “mauvais genres” sur la bande FM qui vient de s’ouvrir. Après une année d’Hypokhâgne, il interrompt ses études pour travailler comme libraire mais c’est la reprise d’un cursus d’histoire des sciences à la Sorbonne en 1987 qui lui fournit la matière de ses premières publications professionnelles, dans la presse et aux éditions Fleuve Noir.
Déterminé à vivre de sa plume, Lehman délaisse provisoirement la bande dessinée et publie au cours des dix années suivantes dix romans, quatre-vingt nouvelles et une centaine d’articles et d’essais dont certains contribuent à refaçonner le paysage de la SF française. La trilogie cyberpunk F.A.U.S.T., le space-opéra Aucune étoile aussi lointaine et l’anthologie Escales sur l’horizon, tous parus entre 1996 et 1998, manifestent ce désir de relancer le genre que Lehman partage avec d’autres écrivains apparus à la même époque, Ayerdhal, Pierre Bordage, Laurent Genefort ou Maurice G. Dantec. Mais sa production est irrégulière et parfois erratique. Auteur « à éclipses », insuffisamment détaché de ses modèles et luttant contre la dépression, il s’éloigne de la fiction pour se consacrer à la critique, à la presse et au cinéma.
Invité par le journal l’Humanité à tenir, pendant toute l’année 2000, une chronique hebdomadaire et par Enki Bilal à participer au scénario d’Immortel Ad Vitam, Lehman disparaît fin 2001 : « [ses] moteurs symboliques se sont arrêtés d’un coup. » L’impossibilité d’écrire Metropolis, uchronie d’une Europe qui n’aurait pas connu la première guerre mondiale, débouche sur une crise profonde qui affecte son rapport au langage. Cette expérience, évoquée dans la conférence La légende du processeur d’histoire et l’essai autobiographique C’est dans la boîte possède une dimension métaphysique qu’on retrouve dans la plupart des textes écrits par Lehman depuis son retour en 2005, y compris ses scénarios de bande dessinée qui l’occupent désormais prioritairement. Cocréateur de la collection Flambant 9 aux éditions de l’Atalante, il publie une dizaine d’albums entre 2007 et 2010. La série en six volumes La Brigade chimérique, coécrite avec Fabrice Colin et dessinée par Gess, semble une tentative de synthèse puisqu’on y retrouve aussi bien la ville de Metropolis que le concept de “processeur d’histoire” et celui du monde comme “récit multimédia”. Parallèlement à son activité de scénariste, Lehman remanie et réédite une partie de ses romans et nouvelles dans trois recueils , publie deux anthologies et devient critique au Monde des Livres. À l'été 2012, il codirige avec Benoit Laureau un numéro spécial de La Quinzaine littéraire intitulé Écrire le futur ?