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Tolstoj, Lev Nikolaevič (1828-1910)

Contents


Biographie

Portrait de Tolstoï par Ilia Répine (1887).

Enfance

Né le 28 août 1828 du calendrier julien ({{date}} du calendrier grégorien) à Iasnaïa Poliana, Léon Tolstoï est le fils de la comtesse Marie Sergueïevna Volkonskaïa, elle-même fille du feld-maréchal Nicolas Volkonsky, mariée à trente-deux ans au comte Nicolas Ilitch Tolstoï, un jeune homme désargenté, ancien combattant de la campagne de Russie. De cette union naquirent quatre fils, Serge, Nicolas, Dimitri, Léon et une fille, Marie. Peu de temps après la naissance de Marie, alors que Léon n'avait que dix-huit mois, la jeune femme mourut d'une fièvre puerpérale.

Jusqu'à huit ans et demi, Léon ne connut que la campagne à Iasnaïa Poliana, la famille et les petits paysans. Il apprit l'arithmétique, ainsi que, partiellement, le français, l'allemand et le russe. Puis la ville attira la fratrie, pour qu'elle y reçoive une éducation de qualité. À cette époque, Léon fut surnommé Liova riova, ce qui signifie Léon le pleurnicheur, du fait de sa grande sensibilité, notamment lors de son départ de Iasnaïa Poliana avec sa famille pour Moscou. Pourtant, avant même d'avoir pu s'habituer à cette nouvelle vie, la famille dut affronter un nouveau malheur : le {{date}}, le père meurt soudainement en pleine rue. L'année suivante, leur grand-mère connaît le même destin. Consécutivement au décès d'Alexandra Ilinitchna Osten-Sacken, une tante qui fut nommée tutrice, sa sœur Pélagie Ilinitchna Youchkov la remplaça dans ce rôle. Cette dernière habitant Kazan, au bord de la Volga, la famille Tolstoï s'y installa.

En 1844, Léon, âgé de seize ans, s'inscrit à la faculté des langues orientales dépendant de l'université de Kazan en pensant devenir diplomate. Très vite, les études l'ennuient, et après avoir ajourné ses examens, il se tourne vers la faculté de droit, où il n'obtient guère de succès. Il constata très tôt que l'enseignement reçu ne l'intéressait pas, seules ses lectures personnelles, nombreuses et variées (histoire, traités philosophiques), éveillaient en lui une curiosité insatisfaite.

Il tint rapidement un journal personnel, ainsi qu'un recueil de règles de conduite qu'il nourrissait quotidiennement, et auquel il faisait référence tout aussi fréquemment. Ses sentiments et ses frustrations l'emportèrent dans ce désir de perfection plus que de droiture. Sa beauté même venait à le chagriner, alors qu'il se désolait d'un physique ingrat. Il écrivit à ce propos :

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Cette ambition ne s'exprima pas immédiatement, et lorsqu'il quitta l'université en 1847, à dix-neuf ans, il pensait trouver sa raison d'être dans les travaux des champs et la bienfaisance : propriétaire terrien boyard, il raconte qu'il lui arrive de fouetter ses serfs, ce qu'il regrette. Pourtant, il se détourna vite de ceux-ci, préférant une vie décousue de Toula à Moscou, rythmée par le jeu (de cartes surtout) et l'alcool.

L'écrivain soldat

Tolstoï en uniforme militaire, par le photographe {{Lien}}, 1856 Ses liens avec son frère aîné Nicolas, qui avait intégré l'armée, l'emmenèrent au combat dans le Caucase, face aux montagnards dirigés par le chef rebelle Chamil. Il y vécut l'aventure et la gloire qu'espéraient tant de jeunes gens de son âge. Il relata plus tard son expérience dans Les Cosaques. Mais dans l'immédiat ses souvenirs d'enfance le préoccupaient davantage. Il en fit un récit, Enfance, qu'il envoya au directeur de la revue Le Contemporain, Nikolaï Nekrassov, qui lui répondit favorablement le 29 août 1852. Le roman connaît un franc succès. Très vite, il entreprend la suite : Adolescence, publié en 1854, puis Jeunesse en 1855.

Le succès aurait pu le convaincre que son destin fût celui d'écrivain. Pourtant, cette idée lui paraît d'autant plus absurde que son attirance pour l'action l'empêche de se penser comme simple homme de plume. La Russie venant de déclarer la guerre à la Turquie, Léon laisse ses amis cosaques et rejoint son régiment en Bessarabie. Il y est dirigé en Crimée, où il connaît le danger, qui l'exalte et le scandalise à la fois. La mort révolte l'homme pressé. Cette impatience est soulagée par la chute de Sébastopol, qui le dégoûte définitivement du métier militaire. Il en composa trois récits, Sébastopol en décembre 1854, Sébastopol en mai 1855, Sébastopol en août 1855, qui émeuvent l'impératrice, et sont traduits en français à la demande d'Alexandre II.

En novembre 1855, Léon Tolstoï fut envoyé comme courrier à Saint-Pétersbourg. Ivan Tourguéniev le reçut, l'hébergea, et Léon Tolstoï put fréquenter grâce à lui les cercles des écrivains cotés de l'époque, mais il s'en détourna rapidement, son humeur le rendant irritable à chaque échange. Il se retira à Iasnaïa Poliana pour vivre plus paisiblement, tout en formulant le souhait de fonder un foyer, qu'il percevait comme nécessaire à son équilibre physique et moral. La mort de son frère Dimitri, de tuberculose, l'en convainquit.

L'errance

Son profond désir de solitude, son horreur de la sexualité débridée et malgré tout sa ferme volonté de fonder un foyer, firent de Tolstoï un homme aux sentiments amoureux complexes, mêlant amour impossible à amour foudroyant. Amour impossible d'abord, puisque l'homme ne parvint pas aisément à trouver cette stabilité tant vénérée ; foudroyant ensuite lorsqu'il fut marié avec Sophie Behrs.

Il rencontra à Paris, où il arriva en février 1857, Ivan Tourguéniev, qui lui fit connaître les arts et la culture française qui l'amusaient et l'agaçaient. Il décida de partir pour la Suisse, où il fit la connaissance de sa tante au second degré, Alexandrine Tolstoï, dont il admirait l'intelligence, avant de revenir en Russie puis de repartir, le {{date}}, pour l'Allemagne, où il effectua des travaux d'inspection des écoles, des études de méthodes pédagogiques. Son frère Nicolas, souffrant de la tuberculose, mourut le 20 septembre de cette même année. Léon Tolstoï continua malgré tout ses investigations, parcourant l'Europe, de Marseille à Rome, de Paris à Londres, où il rendit visite à Alexandre Herzen, ainsi qu'à Bruxelles, où il rencontra Proudhon.

L'abolition du servage, ordonnée par Alexandre II le {{date}}, enchanta Tolstoï – tout en lui faisant craindre que cet événement ne débouchât sur une révolte populaire. Il exerça alors la fonction d'arbitre de paix, chargé de régler les contentieux entre les propriétaires fonciers et les serfs dans le district de Krapivna. L'oisiveté sentimentale de Léon fut abrégée par sa rencontre avec Sophie Behrs, fille d'André Estafiévitch Behrs, un médecin attaché à l'administration du palais impérial de Moscou de lointaine ascendance allemande. Et Tolstoï d'écrire à propos de cet événement :

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Le mari, le père

Maison de Tolstoï]] à Moscou, aujourd'hui musée, où la famille s'installait jusqu'en mai lorsque les enfants furent en âge de suivre des études

Son mariage avec Sophie Behrs, de seize ans sa cadette, fut d'autant plus improbable que l'attachement que Léon vouait à la solitude, sa forte personnalité, son passé tumultueux, faisaient de cet engagement amoureux une folie. La veille du mariage, Léon fit lire à Sophie le Journal dans lequel il détaillait ses pires défauts. Cela ne découragea pas la jeune femme, et le 23 septembre 1862, les fiancés se marièrent à l'église de la Nativité de la Vierge.

Installé à Iasnaïa Poliana, le couple connut des jours heureux, quiétude que Léon assure n'avoir pas vécue jusqu'alors. Ce calme, bien qu'il ait souvent fait souffrir Sophie, citadine de cœur, a permis à Tolstoï d'atteindre la sérénité de l'écrivain. Il publia alors Les Cosaques (1863), puis commença d'écrire La Guerre et la Paix intitulé d'abord l'Année 1805. Après s'être rendu sur le champ de bataille de Borodino, et s'être documenté à Moscou, il revint à Iasnaïa Poliana pour continuer d'écrire, avec une rigueur étonnante. Reprenant plusieurs fois des passages entiers de la Guerre et la Paix, il parvint à achever d'écrire le sixième et dernier volume de l'ouvrage en 1869.

La même année, il vit naître son troisième fils, baptisé comme lui Léon. Cette période de jouissance contraste bientôt avec la tourmente que l'écrivain vit à la suite d'une prise de conscience soudaine et puissante, celle de n'être qu'un mortel. Ce bouleversement moral se produit alors que Tolstoï est en voyage vers Penza, lors d'un arrêt dans une auberge de la ville d'Arzamas. Léon confia à ce sujet, dans son Journal :

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C'est alors que Léon se plongea dans la lecture de philosophes, Schopenhauer en particulier, qu'il apprécia rapidement. Il fit, alors, de nombreux projets, entama la rédaction d'un syllabaire, rouvrit une école notamment. Cette effervescence cachait en réalité un profond vide causé par l'achèvement de son œuvre la Guerre et la Paix. Le talent de Tolstoï fut bientôt concentré sur un dessein, celui de rédiger un « roman sur la vie contemporaine et dont le sujet serait une femme infidèle ». Le projet de rédaction dAnna Karénine naquit après que Léon eut parcouru les Récits de feu Ivan Pétrovitch Belkine de Pouchkine, en mars 1873, que son fils Serge lisait alors.

La rédaction dAnna Karénine se fit pourtant lentement, interrompue par de nombreux drames de famille. En novembre 1873 le dernier-né des Tolstoï, Pierre, mourut à l'âge de dix-huit mois, emporté par le croup (diphtérie). L'année suivante, Nicolas, le cinquième fils, ne vécut guère plus d'un an, hydrocéphale de naissance. Sophie, malade, fit une fausse couche peu de temps après, puis deux tantes (Toinette et Pélagie Youchkov) moururent. Cette accumulation de tragédies retarda la parution du roman mais ne l'empêcha pas, et l'entêtement de Léon eut raison de son scepticisme, voire de son dégoût pour l'œuvre qu'il venait de faire naître, qu'il jugea « exécrable ». La critique en fit autrement et l'accueillit favorablement. Comme après avoir achevé l'écriture du précédent roman, il connut une période trouble, où les considérations philosophiques qu'il avait mêlées aux évènements romanesques dans Anna Karénine avaient accouché d'une pensée éthico-religieuse.

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