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Thoreau, Henry David (1817-1862)

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Biographie

Thoreau accuse un silence autobiographique tout au long de son œuvre, souligne Michel Granger dans Henry David Thoreau. Néanmoins, grâce à son Journal et aux témoignages de proches tels {{Lien}}, qui publie sa première biographie (Thoreau the Poet-Naturalist, en 1873) ou Harrison Blake (qui entretient une correspondance régulière avec Thoreau de mars 1848 à mai 1861) le fil de son existence est connu. Le témoignage de son ami et mentor Ralph Waldo Emerson, dans Thoreau, est également précieux. Le journal intime de Thoreau n'est par ailleurs publié qu'en 1906. {{Citation}}, explique Thoreau dans un poème, car il est avant tout à la recherche de l'existence la plus authentique. Selon l'expression de Michel Barrucand : {{Citation}}

Premières années (1817-1828)

Portrait au crayon d'Henry David Thoreau en 1854 par Samuel Worcester Rowse et conservé à la {{lang}}.

David Henry Thoreau, d'origine écossaise et française, naît le 12 juillet 1817, dans la ville de Concord, Massachusetts, comptant alors 2000 habitants. David Henry est ainsi nommé en l'honneur d'un oncle paternel récemment décédé, David Thoreau. Il est le fils de John Thoreau et de Cynthia Dunbar. Il a un frère et une sœur aînés, John Junior et Helen et une sœur cadette, Sophia. La maison où il est né a été préservée, sur {{lang}}, après avoir été déplacée d'environ {{unité}}.

Son grand-père paternel est d'origine française, né à Saint-Hélier, à Jersey. Il a quitté l'île en 1773 pour les États-Unis sur un bateau corsaire. Son grand-père maternel, Asa Dunbar, successivement enseignant, pasteur et avocat, a joué un rôle dans ce qui est nommé la « rébellion de pain et de beurre », à Harvard, en 1766, et qui est la première manifestation d'étudiants de l'histoire des États-Unis{{,}}{{,}}.

Selon son meilleur ami, {{Lien}}, Thoreau a une ressemblance physique avec Jules César et, bien qu'il soit de taille moyenne, lui-même ne se juge pas beau, affublé d'un nez qu'il considère être son {{citation}}. Le poète Nathaniel Hawthorne, quant à lui, le décrit ainsi : {{citation}}

À partir de 1818, sa famille traverse des années de difficultés financières mais, en 1824, son père décide de créer une fabrique de crayons à Concord. Les Thoreau s'installent donc à Chelmsford, dans le Massachusetts puis, en 1821, ils emménagent à Boston. David Henry y entre bientôt à l'école. C'est en 1822 qu'il découvre l'étang de Walden ({{lang}}), lors d'un séjour chez sa grand-mère. Sa fibre littéraire commence alors à apparaître et, en 1827, le jeune Thoreau écrit son premier poème, Les Saisons.

Années de formation (1828-1837)

À partir de 1828, à l'école de Concord, il apprend le latin, le grec et diverses langues comme le français, l'italien, l'allemand avec Orestes Brownson mais aussi l'espagnol. En 1833, grâce à une bourse, il entre à l'université Harvard pour y étudier la rhétorique, le Nouveau Testament, la philosophie et les sciences. Par l'intermédiaire de Lucy Brown, la première femme qu'il a aimée, il y rencontre Ralph Waldo Emerson (1803-1882) qui devient son ami, puis son mentor, Emerson étant en effet le chef de file du mouvement transcendantaliste naissant.

La demeure familiale de Thoreau, en 1860.

Dès 1835, en dehors des trimestres d’études à Harvard, il enseigne quelques mois dans une école primaire de Canton, dans le Massachusetts. Thoreau découvre véritablement le transcendantalisme en 1835 avant d'obtenir son diplôme en août 1837, célébration qui sera l'occasion de prononcer un discours contre la société intitulé L’esprit commercial des temps modernes et son influence sur le caractère politique, moral et littéraire d’une nation et qui contient toute sa pensée future. Une légende veut qu'il ait refusé de payer les cinq dollars nécessaires pour le diplôme ; en réalité, le master qu'il refuse d'acheter n'avait aucun mérite académique : l'université l'offrait aux étudiants « qui ont prouvé leur santé physique en étant vivants trois années après avoir obtenu la licence, et par leurs économies, leurs dépenses, ou en héritant la qualité ou condition en ayant cinq dollars à donner à l'université »{{sic}}.

Thoreau devient un disciple de Ralph Waldo Emerson. Ce dernier, alors âgé de 34 ans, a déjà publié deux ouvrages importants dans l'histoire de la littérature américaine : Nature et L’intellectuel américain alors que Thoreau, âgé de 20 ans, n'a encore publié aucun texte. Néanmoins, les deux hommes deviennent rapidement très proches, nourrissant dès lors une amitié typique de la philosophie transcendantaliste. Emerson lui fait connaître un cercle d'auteurs et d’autres intellectuels qui fondent le Transcendental Club en 1836 dont : {{Lien}} qui devient son meilleur ami (et qui l'initie à l'unitarisme, confession qui s'est alors récemment imposée et que Channing enseigne à Harvard), Margaret Fuller, Amos Bronson Alcott ou Jones Very. Tous s'installent à Concord, faisant de ce petit village le centre du rayonnement intellectuel du courant transcendantaliste. Thoreau est alors le seul natif de Concord parmi ces écrivains. Pour Michel Granger, il participe, durant ses années de formation et de production, approximativement entre 1835 et 1860, à ce que F. O. Matthiessen a appelé la « Renaissance américaine » et qui est en fait la naissance d'une littérature authentiquement nationale.

Retour à Concord (1837-1844)

Portrait de Ralph Waldo Emerson jeune.

Après avoir obtenu son diplôme, Thoreau devient instituteur à l'école publique de Concord mais il démissionne après quelques mois de service car il refuse d'appliquer les châtiments corporels alors en vigueur. Après sa démission, il ne retrouve pas d'emploi, en raison de la crise économique de 1837.

À partir d'octobre 1837, Thoreau commence à écrire, sur une suggestion d'Emerson, un journal dans lequel il note ses observations sur la nature et élabore des critiques des livres qu'il lit. La première chose qu'il y écrit, en date du 22 octobre 1837, est une réflexion d'introspection à propos de l'intérêt de tenir ce journal : {{Citation}}. Thoreau tient ce journal à jour jusqu'en 1861. Celui-ci devient la source de nombre de ses publications et notamment de Walden. Parallèlement, et de son propre fait, il change l'ordre de ses prénoms et se dénomme maintenant Henri-David Thoreau. Pour Michel Granger, il souhaite signifier par ce geste sa volonté de réarranger sa vie et lui donner un sens propre.

En 1838, ne trouvant pas d'emploi comme professeur, il ouvre une école privée chez lui. Son frère John le rejoint peu après. Ils intègrent plusieurs concepts progressistes dans leur programme scolaire, dont les nouveaux principes d’éducation prônés par {{Lien}} (sorties d’éveil, herborisation, refus des sévices et association des enfants à la discipline, promenade dans les bois). Les Thoreau y enseignent jusqu'en mars 1841. La même année il donne une conférence intitulée La Société au Lyceum de Concord, discours faisant écho à celle d'Emerson, Discours de l'École de théologie donnée à Harvard et qui constitue une {{Citation}}. Seul, Thoreau effectue également cette année-là sa première excursion dans le Maine, en pleine nature sauvage. Il effectue une autre excursion en 1839, sur les rivières Concord et Merrimack, avec son frère John, en barque (voile - aviron), voyage qui forme la trame de Une semaine sur les rivières de Concord et Merrimack qui est édité en 1849 mais qui ne connaît qu'un très faible succès littéraire.

En 1840 Thoreau publie un premier essai sur le poète épique latin : Aulus Persius Flaccus et un poème : Sympathy, les deux publiés dans The Dial (« Le Cadran »), le journal transcendantaliste dirigé par Margaret Fuller. Pendant quatre ans, jusqu'à ce qu'elle disparaisse, Thoreau fournit plusieurs textes à cette revue. Pour Michel Granger, c'est à ce moment que Thoreau réalise ce qu'il veut réellement faire dans la vie. Il s'émancipe quelque peu du transcendantalisme, devient moins malléable et, même, dépasse son initiateur et mentor Emerson{{,}}. Mais Thoreau se voit avant tout comme un poète, ayant choisi de pratiquer le genre dès 1839 et ce jusqu'en 1842. Par ailleurs, Henri David et John tombent amoureux de la même jeune fille, Ellen Sewall. John lui propose de l'épouser puis Henry quelques mois plus tard mais celle-ci refuse les deux propositions, obéissant à son père et les éconduit l’un et l’autre.

En 1841, l'école des frères Thoreau, bien qu'ayant un certain succès, ferme ses portes. {{citation}} selon Gilles Farcet. Thoreau séjourne alors deux ans chez Emerson, à Concord, comme tuteur de son fils, Waldo, et travaille comme assistant éditorial et comme manœuvre-jardinier. Encouragé par Emerson et Fuller, il continue d'écrire dans la revue transcendantaliste The Dial mais aussi pour d'autres magazines. Cependant, {{Citation}} relativise Gilles Farcet. Il donne cependant des conférences au Lyceum de Concord, participant au développement du courant transcendantaliste. Il fait cette année-là la connaissance du poète américain Nathaniel Hawthorne qui vient de s'installer à Concord.

L'étang de Walden, en hiver.

Son frère John meurt du tétanos le {{date}}. Thoreau en est profondément affecté. Il publie la même année L'Histoire naturelle du Massachusetts, ouvrage en partie critique de livre et en partie essai d'histoire naturelle. Emerson et Thoreau sont alors très proches car au moment où ce dernier perd son frère, le fils d'Emerson, âgé de six ans, meurt de la scarlatine.

En 1843 Thoreau quitte Concord pour Staten Island, dans l'État de New York où il devient le tuteur des enfants de William Emerson, le frère de Ralph. Il y apprécie la flore locale très différente de celle de son village et découvre l'océan et la ville de New York. Habiter chez William Emerson lui permet d'accéder à la {{lang}} où il découvre des œuvres de littérature orientale peu communes à l'époque aux États-Unis. Il rencontre aussi Horace Greeley, fondateur du {{lang}}, qui l'aide à publier certains de ses travaux et qui devient son agent littéraire. À la demande d'Emerson, Thoreau rédige un long article au sujet du livre de John Adolphus Etzler, Le Paradis à (re)conquérir (Paradise to be (re)gained), dans {{lang}}, étude qui porte en germe toute la réflexion qui nourrit par la suite ses livres engagés.

Après une année à New York, Thoreau se trouve peu d'affinité intellectuelle avec William Emerson, et Concord lui manque. Il y rentre donc pour travailler dans l'usine familiale de crayons. Il applique alors un processus produisant de meilleures mines de crayons, en utilisant de l'argile comme liant pour le graphite, technique exploitée dans le New Hampshire depuis la découverte de minerai supérieur, en 1821, par l'oncle de Thoreau, Charles Dunbar et qui a su exploiter le gisement aux alentours de Bristol. Plus tard, Thoreau transforme l'atelier en usine de production de graphite pour encre de machines de typographie. Il semble que l'air chargé en poussière de graphite ait endommagé ses poumons plus gravement que la tuberculose de laquelle il décèdera par la suite.

En 1844, en avril, avec son ami Edward Hoar, il déclenche accidentellement un incendie qui ravage environ 120 hectares des bois de Walden, autour de l'étang. Il s'attire alors la méfiance des habitants, puis, souhaitant disparaître quelque temps, aide son père à construire une nouvelle maison familiale. Il parle souvent d'acheter ou de louer une ferme, afin de vivre de peu de moyens et dans la solitude, cadre idéal à la conception de son premier livre. Pour Thoreau, il devient en effet fondamental de {{Citation}}, question cruciale formant la trame de Walden.

Vie à Walden et excursions (1844-1849)

Fin 1844, Emerson achète un terrain autour de l'étang de Walden et le met à la disposition de Thoreau qui souhaite se retirer au calme pour écrire{{,}}. En mars 1845, il commence la fabrication d'une cabane de pin, sur les rives de l'étang, à {{unité}} de sa maison natale. C'est le début d'une expérience qui dure deux ans, menée en autarcie (Thoreau a planté 1 hectare de pommes de terre, de fèves, de blé et de maïs), et qu'il raconte dans son livre Walden ou la vie dans les bois (Walden or Life in the Woods).

D'après Michel Granger, Thoreau fait une retraite à Walden Pond car il a cherché à disparaître momentanément de la vie de Concord, sa ville natale. Il débute aussi la rédaction de Une Semaine sur les rivières Concord et Merrimack (A Week on the Concord and Merrimack Rivers), son premier succès littéraire. Thoreau veut vivre simplement et seul dans les bois, y mener {{Citation}}. Il dort dans sa cabane dès la nuit du {{date}}, jour anniversaire de la Déclaration d’Indépendance aux États-Unis. Pour Michel Granger, il s'agit de {{Citation}}. Il ne s'agit alors pas d'une fugue ou d'une vie d'ermite, puisque l'écrivain revenait souvent voir ses amis, mais d'un choix délibéré qui rappelle par bien des côtés l'expérience faite par Jean-Jacques Rousseau dans la forêt d'Ermenonville. Thoreau donne à ses contemporains l'exemple d'un rapport actif avec la nature, en dehors de toute contemplation romantique et s'élève contre la société à laquelle il oppose le concept de « simplicité volontaire ».

Timbre américain à l'effigie de Thoreau.

Le 25 juillet 1846, Sam Staples, agent de recouvrements des impôts locaux lui ordonne de payer six ans d'arriérés. Thoreau, qui refuse de payer ses impôts à un État qui admet l'esclavage et fait la guerre au Mexique, est arrêté alors qu'il se rend chez son cordonnier puis emprisonné durant une nuit, mais relâché le jour suivant, une de ses tantes ayant payé, contre son gré, les arriérés à sa place. Cet événement marque la pensée de Thoreau et nourrit ses réflexions qui constitueront son essai politique, La Désobéissance civile.

En septembre il effectue une excursion dans le Maine puis, à son retour à Walden, il accueille dans sa cabane le {{1er}} août, pour la commémoration de l’émancipation des esclaves aux Antilles, l’assemblée générale des anti-esclavagistes de sa commune. En août 1846, Thoreau quitte Walden pour aller au mont Katahdin dans le Maine, excursion racontée dans le premier chapitre de The Maine Woods, « Ktaadn » et qui représente un modèle d'écriture poétique dans la littérature américaine de l'époque.

Thoreau quitte définitivement sa retraite de {{lang}} le {{date}} et retourne habiter chez Emerson chez qui il reste jusqu'en juillet 1848. Pendant le voyage du philosophe en Angleterre, il s’occupe en effet de sa maison durant dix mois et commence à prendre des notes sur les Indiens d’Amérique. Il produit ainsi près de 3000 pages de citations et de notes, entre 1847 et 1861. Il décide ensuite de retourner dans la maison de ses parents pour travailler et payer ses dettes, tout en révisant continuellement son manuscrit. Il donne la première de ses conférences sur son séjour à Walden, intitulée « Histoire de moi-même », à Concord et qui procure à Thoreau les quelques éléments qui forment le début actuel de Walden. En janvier et février 1848 il fait une lecture célèbre, intitulée « Les droits et les devoirs de l'individu en relation au gouvernement » au Concord Lyceum. Amos Bronson Alcott y assiste et, dans son journal intime, donne de précieux renseignements sur ces conférences, même si Thoreau réécrit et modifie par la suite le texte de sa conférence pour son livre La Désobéissance civile, publié en mai 1849 par Elizabeth Peabody dans ses Aesthetic Papers.

L'année suivante il retourne vivre chez ses parents et travaille avec son père. Ponctuellement il effectue des travaux d'arpentage et de peinture de bâtiments. Il marche aussi pendant de longues heures. Chaque année il donne des conférences à Concord et à Boston et même dans le Maine. Il publie également des essais dans des magazines de Nouvelle-Angleterre. Devenant quasiment un « gourou », il reçoit des admirateurs, souvent jeunes, fascinés par l'aventure de Walden. Il complète le premier brouillon de Une Semaine sur les rivières Concord et Merrimack, une élégie dédiée à son frère John, décrivant leur voyage aux montagnes Blanches en 1839. Faute d'éditeur voulant publier cette œuvre, Emerson l'encourage à l'éditer à son propre compte, ce que Thoreau fait avec l'éditeur d'Emerson, Munroe. Ce dernier fait peu de publicité pour le livre, qui se vend donc mal et endette Thoreau qui finit par se brouiller avec son ancien ami Emerson.

Néanmoins, en 1849, Thoreau annonce la publication prochaine de Walden dont il a déjà rédigé trois versions. Il rencontre H.G.O. Blake, un instituteur avec qui il entretient une abondante et riche correspondance et qui le soutient dans son projet d'écrire sur son séjour dans les bois. Il effectue enfin une excursion à cap Cod, en compagnie de {{Lien}}. À cette époque, Thoreau est de nouveau endeuillé : sa sœur Helen meurt des suites d'une tuberculose.

Dernières années (1850-1862)

La péninsule de Cape Cod (vue satellite), que Thoreau a contribué à décrire et à inventorier.

En 1850 la famille Thoreau emménage dans une maison de la rue principale de Concord. En juillet, l'auteur de Walden se rend à Fire Island pour rapatrier la dépouille de son amie transcendantaliste Margaret Fuller, morte au cours d'un naufrage. Il part ensuite au Québec avec {{Lien}} toujours, en train. Il proteste, en 1851, contre les lois esclavagistes et aide même des esclaves à fuir vers le Canada. La même année, il admire le naturaliste William Bartram et surtout Charles Darwin dont il découvre et soutient les travaux ; il lit en particulier son livre, Le Voyage du Beagle. Fasciné par l'histoire naturelle et les livres de voyages ou d'expéditions, il se documente beaucoup sur la botanique. Son journal intime abonde en observations naturalistes, sur la flore surtout, celle des bois de Concord, et note diverses informations comme le temps que prennent les fruits pour mûrir, la profondeur fluctuante de l'étang de Walden, les dates des migrations aviaires. Il cherche même à mesurer et à anticiper les saisons.

En 1852, il met la dernière main au manuscrit de Walden, écrit en partie grâce à son Journal. Il devient ensuite géomètre-expert et continue à remplir ses cahiers d'observations détaillées quant au paysage de Concord et ce sur une zone de {{unité}}. Il tient aussi des carnets qui seront la base de ses écrits sur l'histoire naturelle, dont Autumnal Tints, The Succession of Trees, et Wild Apples, un essai sur la destruction d'espèces de pommes locales. Pour Donald Worster, après 1850, {{Citation}} du fait de ses observations minutieuses. En 1853, il publie la première partie du roman de voyage Un Yankee au Canada, définitivement édité en 1866. Par ailleurs l'entreprise paternelle connaît des difficultés : la fabrication de crayons est stoppée et son père ne produit plus que de la plombagine. Thoreau est lassé de cette activité qui le détourne de ses véritables occupations spirituelles. Il décline par ailleurs l'invitation de l'{{lang}}, ne se considérant pas comme scientifique et se méfiant de l'élitisme.

Thoreau donne le 4 juillet 1854 une conférence qui forme les essais L'Esclavage dans le Massachusetts{{,}} et La Vie sans principe. En février et mars il rédige la septième version de Walden et prépare le manuscrit pour l'éditeur. Il rend visite à Daniel Ricketson, un admirateur de New Bedford, qui rejoint par la suite le mouvement transcendantaliste. Il remet enfin la septième version de Walden à l'éditeur Ticknor and Fields, qui est publié en août 1854, tiré à 2000 exemplaires, et qui raconte les deux ans, deux mois et deux jours passés dans la forêt aux alentours de l'étang de Walden, non loin de ses amis et de sa famille, à Concord. Le livre qui condense ces deux années en une seule, utilisant le passage des quatre saisons comme symbole du développement de soi. Walden est d'abord tiré à 2000 exemplaires, vendu chacun pour {{unité}}, mais le stock ne sera écoulé qu'en 1859. La première année, toutefois, 1750 unités sont vendues, ce qui constitue le premier succès littéraire de Thoreau.

En 1855, il reçoit d'un jeune anglais Thomas Cholmondeley, venu rencontrer Emerson, 44 livres orientaux. Thoreau se passionne en effet, depuis 1841 et grâce à Emerson, pour l'orientalisme et pour le bouddhisme, mais aussi pour la culture des Indiens d'Amérique. Il a ainsi pris connaissance des grands textes de la spiritualité indienne dont le Bhagavad-Gîtâ et le Manavadharmashastra. Il effectue des traductions de ces textes et en publie des passages dans The Dial. Thoreau a alors la plus belle bibliothèque orientale en Amérique.

Ambrotype d'E. S. Dunshee réalisé en août 1861 d'Henry David Thoreau à la fin de sa vie, à 44 ans.

Thoreau publie ensuite ses premiers essais sur la péninsule de Cape Cod, où il se rend pour une troisième excursion. En novembre 1856, il rend visite au poète Walt Whitman, à Brooklyn, lors d'une excursion en compagnie d'Alcott à New York. Dans une lettre à Harrison Blake, du 19 novembre, Thoreau le décrit comme {{Citation}}. En 1857, il effectue sa quatrième excursion au Cape Cod, puis il se rend pour la dernière fois dans le Maine, en compagnie d'un guide indien, Joe Polis. Il rencontre à Concord l'abolitionniste John Brown, dont il prend la défense par la suite. Son amitié avec Emerson prend fin en février. En 1858, le journal l’Atlantic Monthly publie son texte « Chesuncook », en l'hommage de la beauté du lac du même nom, dans le Maine, qui forme la seconde partie des Forêts du Maine, publié en 1864. Quand son père meurt, en 1859, Thoreau reprend la direction de la fabrique de graphite.

Après que John Brown ait été capturé, lors d'une tentative d'insurrection ratée à Harpers Ferry, Thoreau offre de donner une conférence en remplacement de Frederick Douglass, qui ne se sentait plus en sécurité de s'exprimer publiquement à Concord. Un large auditoire l'a écouté pendant une heure et demi donner des informations sur la vie de Brown, faire son éloge, et fustiger « l'apathie et la retenue » de la presse abolitionniste ; « le thème semblait avoir éveillé l'ermite de Concorde de son état habituel d'indifférence philosophique ». Ce discours est un Plaidoyer pour John Brown. Le jour de l'exécution de Brown, le 2 décembre 1859, Thoreau prononce un éloge funèbre de l'abolitionniste à Concord, puis à Boston et à Worcester ; « Le Martyre de John Brown ».

Une tuberculose contractée en 1835 se ravive en 1859 par une bronchite qui survient après une excursion de nuit où il était allé compter les cernes des chicots d'arbres tombés lors d'une tempête. Son état de santé empire durant trois ans, malgré de brefs rétablissements, jusqu'à ce qu'il ne puisse se mouvoir et qu'il soit obligé de s'aliter. Sentant sa fin venir, Thoreau passe les dernières années de sa vie à réviser et éditer ses œuvres non encore publiées, dont Excursions et The Maine Woods, ainsi qu'à demander à des maisons d'édition de rééditer A Week on the Concord and Merrimack Rivers et Walden. Thoreau publie en juillet 1860 Les Derniers jours de John Brown. Il effectue aussi sa dernière excursion, au mont Monadnock, dans le New Hampshire, en compagnie de son ami {{Lien}}. Il donne des conférences concernant la succession des essences d'arbres, qui forme l'ouvrage La Succession des arbres en forêt. {{Citation}} explique Michel Granger.

La tombe d'Henry David Thoreau, au cimetière de Sleepy Hollow. De gauche à droite : John Thoreau, père de Henry David, Henry, Sophia, Cynthia sa mère.

En décembre, son état de santé empire. De mai à juillet 1861, il voyage dans le Minnesota avec Horace Mann Jr., un botaniste. Il visite ainsi la région des Grands Lacs (chutes du Niagara, Détroit, Chicago, Milwaukee, Saint Paul et l'île Mackinac). L'essai De la marche (Walking) est publié en 1862 dans la revue The Atlantic Monthly. Revenu à Concord très affaibli, Thoreau décide de préparer, avec l'aide de sa sœur Sophia, ses manuscrits en vue de leurs publications. Il passe beaucoup de temps à écrire des lettres et à poursuivre son journal intime jusqu'à ce qu'il soit trop frêle pour écrire. Ses amis sont étonnés de son aspect fort diminué et fascinés par son acceptation tranquille de la mort. Quand sa tante Louisa lui demande dans les dernières semaines de sa vie s'il avait fait sa paix avec Dieu, Thoreau lui répond tout simplement {{Citation}}.

Henry David Thoreau meurt le {{date}} à Concord, à 44 ans. Il est resté célibataire toute sa vie durant. Il est mis en terre le 9 mai. D'abord enterré dans le caveau familial du côté maternel (les Dunbar), lui et ses parents immédiats sont transférés au cimetière de Sleepy Hollow, à Concord. C'est Ralph Waldo Emerson qui prononce son éloge funèbre dans lequel le philosophe résume la vie de l'auteur de Walden par cette phrase : {{Citation}}. La majorité de ses œuvres sont publiées de manière posthume : Les Forêts du Maine en 1864, Cape Cod en 1865, en 1894 ce sont onze volumes d’écrits qui sont publiés chez Riverside, puis en 1906 les Éditions Walden en vingt volumes récapitulent ses travaux.