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Bernanos, Georges (1888-1948)

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Biographie

Plaque sur la maison natale à Paris, 28 rue Joubert. Son père, Émile Bernanos, est un tapissier décorateur d'origine lorraine. Sa mère, Hermance Moreau, est issue d'une famille de paysans berrichons (Pellevoisin, Indre). Il garde de son éducation une foi catholique et des convictions monarchistes. Il passe sa jeunesse à Fressin en Artois. Il fréquente le Collège Sainte-Marie, à Aire-sur-la-Lys. Cette région du Nord marquera profondément son enfance et son adolescence, et constituera le décor de la plupart de ses romans.

Premiers engagements et premières œuvres

La maison des Bernanos à Fressin. Catholique fervent, monarchiste passionné, il milite très jeune dans les rangs de l'Action française en participant aux activités des Camelots du roi pendant ses études de lettres, puis à la tête du journal L'Avant-garde de Normandie jusqu'à la Grande guerre. Réformé, il décide tout de même de participer à la guerre en se portant volontaire, d'abord dans l'aviation, en particulier à Issy-les-Moulineaux et sur la future Base aérienne 122 Chartres-Champhol, puis dans le 6{{e}} régiment de dragons et sera plusieurs fois blessé. Après la guerre, il cesse de militer, rompant avec l'Action française, avant de s'en rapprocher lors de la condamnation romaine de 1926 et de participer à certaines de ses activités culturelles.

Ayant épousé en 1917 Jeanne Talbert d'Arc (1893-1960), lointaine descendante d'un frère de Jeanne d'Arc, il mène alors une vie matérielle difficile et instable (il travaille dans une compagnie d'assurances) dans laquelle il entraîne sa famille de six enfants et son épouse à la santé fragile.

Ce n'est qu'après le succès de Sous le soleil de Satan que Bernanos peut se consacrer entièrement à la littérature. En moins de vingt ans, il écrit l'essentiel de son œuvre romanesque où s'expriment ses hantises : les péchés de l'humanité, la puissance du mal et le secours de la grâce.

Sous le soleil de Satan

Publié en 1926 aux éditions Plon, ce premier roman est à la fois un succès public et critique. André Gide place Bernanos dans la lignée de Barbey d'Aurevilly, mais {{Citation}} ajoute Malraux.

Sous le soleil de Satan est, selon Bernanos, un {{Citation}}. Il commence à l'écrire durant un séjour à Bar-le-Duc en 1920, époque où pour lui {{Citation}}. Il confie {{Citation}} et {{Citation}} mais ne pas vouloir {{Citation}}.

Inspiré du curé d'Ars, le personnage principal du livre, l'abbé Donissan, est un prêtre tourmenté qui doute de lui-même, jusqu'à se croire indigne d'exercer son ministère. Son supérieur et père spirituel, l'abbé Menou-Segrais voit pourtant en lui un saint en devenir. Et en effet cet {{Citation}} tel que le définit Paul Claudel possède la faculté de transmettre la grâce divine autour de lui. Plus tard, il recevra même le don de {{Citation}}, au cours d'une rencontre nocturne extraordinaire avec Satan lui-même, celui dont la haine s'est {{Citation}}. Son destin surnaturel va le confronter aussi à Mouchette, une jeune fille qu'il ne parviendra pas à sauver malgré un engagement total de lui-même.

L'adaptation cinématographique du roman vaudra à Maurice Pialat la Palme d'or au Festival de Cannes 1987.

Sous le soleil de Satan est suivi de L'Imposture en 1927 et de sa suite La Joie, qui reçoit le prix Fémina en 1929.

La Grande Peur des bien-pensants

Meuse]]) où Bernanos écrivit son premier roman Sous le soleil de Satan Publié en 1931, ce livre polémique, considéré comme le premier pamphlet de Georges Bernanos, avait au départ comme titre Démission de la France. Bernanos commence par une condamnation sévère de la répression de la Commune pour poursuivre sur un violent réquisitoire contre son époque, la Troisième République et ses politiques, la bourgeoisie bien-pensante et surtout les puissances d'argent. Bernanos y rend hommage aussi à Édouard Drumont, avec lequel il partage sa détestation de la bourgeoisie mais aussi l'association des juifs à la finance, aux banques, au pouvoir de l’argent sur celui du peuple, un sujet qui fait polémique dans la France de cette époque et qui suscite des propos antisémites de l'écrivain. Bernanos, qui a fait la guerre de 1914-1918, y fustige aussi un patriotisme perverti qui humilie l'ennemi allemand dans la défaite au lieu de le respecter, en trahissant ainsi l'honneur de ceux qui ont combattu et en hypothéquant l'avenir.

En 1932, sa collaboration au Figaro, racheté par le parfumeur François Coty, entraîne une violente polémique avec l'Action française et sa rupture publique définitive avec Charles Maurras.

Le {{date}}, en se rendant d'Avallon en Suisse, où l'un de ses enfants est pensionnaire, il est renversé, à Montbéliard, par la voiture d'un instituteur en retraite qui lui barre le passage : le garde-boue lui rentre dans la jambe, là même où il a été blessé en 14-18.

Journal d'un curé de campagne

Bernanos s'installe aux Baléares en 1934, en partie pour des raisons financières. Il y écrit Le Journal d'un curé de campagne. Publié en 1936, il sera couronné par le Grand prix du roman de l'Académie française, puis adapté au cinéma sous le même titre par Robert Bresson (1950).

Ce livre est l'expression d'une très profonde spiritualité. Il témoigne d'un style limpide et épuré. La figure du curé d'Ambricourt rejoint celle de sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, portée sur les autels par Pie XI en 1925. Il est possible qu'elle soit aussi inspirée par un jeune prêtre (l'Abbé Camier), mort de tuberculose à vingt-huit ans, que Bernanos a côtoyé dans son enfance. De Thérèse, son personnage suit la petite voie de l'enfance spirituelle. Le « Tout est grâce » final du roman n'est d'ailleurs pas de Bernanos lui-même, mais de sa prestigieuse aînée. Ce roman lumineux, baigné par « l'extraordinaire dans l'ordinaire », est l'un des plus célèbres de son auteur, probablement parce qu'il s'y révèle lui-même, de manière profonde et bouleversante, à travers la présence du curé d'Ambricourt. Il est vrai que Bernanos a la particularité d'être toujours extrêmement proche de ses personnages, tel un accompagnateur témoignant d'une présence extrêmement attentive, et parfois fraternelle.

Les Grands Cimetières sous la lune

C'est également lors de son exil que Bernanos rédige Les Grands Cimetières sous la lune, un violent pamphlet anti-franquiste qui aura en France un grand retentissement lors de sa publication en 1938.

Bernanos séjourne à Majorque lorsque la guerre civile éclate. D'abord sympathisant du mouvement franquiste pendant les trois mois qui suivent le soulèvement, Bernanos est choqué par la barbarie des combats et révolté par la complicité du clergé espagnol avec Franco. En janvier 1937, il évoque l'arrestation par les franquistes de « pauvres types simplement suspects de peu d'enthousiasme pour le mouvement [...] Les autres camions amenaient le bétail. Les malheureux descendaient ayant à leur droite le mur expiatoire criblé de sang, et à leur gauche les cadavres flamboyants. L'ignoble évêque de Majorque laisse faire tout ça. »

Alors qu'il réside encore à Palma de Majorque, sa tête est mise à prix par Franco. Bernanos offre {{Citation}} qui prend rapidement une actualité extraordinaire pour se révéler une prophétie des grandes catastrophes du siècle. Ce livre qui, comme L'Espoir d'André Malraux, est un témoignage important de la guerre d'Espagne, lui vaudra l'hostilité d'une grande partie de la droite nationaliste, en particulier de son ancienne famille politique, l'Action française, avec laquelle il avait rompu définitivement en 1932.

Exil au Brésil

Il quitte l'Espagne en mars 1937 et retourne en France. Le 20 juillet 1938, deux mois avant les accords de Munich, la honte que lui inspire la faiblesse des politiques français face à l'Allemagne de Hitler conduit Bernanos à s'exiler en Amérique du Sud. Réalisant un rêve d'enfance, il envisage initialement de se rendre au Paraguay. Il fait escale à Rio de Janeiro au Brésil en août 1938. Enthousiasmé par ce pays, il décide d'y demeurer et s'installe en août 1940 à Barbacena, dans une petite maison au flanc d'une colline dénommée {{Citation étrangère}}, la {{Citation}}. Il y reçoit entre autres l'écrivain autrichien Stefan Zweig peu avant le suicide de ce dernier.

Après la défaite de 1940, il se rallie à l'appel lancé le {{date}} depuis Londres par de Gaulle et décide de soutenir l'action de la France libre dans de nombreux articles de presse où il met cette fois son talent de polémiste contre le régime de Vichy et au service de la Résistance. Il entretient alors une longue correspondance avec Albert Ledoux, le représentant personnel du général de Gaulle pour toute l'Amérique du Sud. Il qualifie Pétain de {{Citation}} et sa révolution nationale de {{Citation}}.

En 1941, son fils Yves rejoint les Forces françaises libres à Londres. Son autre fils, Michel, jugé trop jeune par le Comité de la France libre de Rio, partira l'année suivante. Il participera plus tard au débarquement de Normandie, tout comme son neveu Guy Hattu, second-maître au Commando Kieffer, qui prendra part à la prise de l'île de Walcheren en Hollande à la Toussaint 1944.

Avant de rentrer en France en 1945, Bernanos déclare aux Brésiliens : « Le plus grand, le plus profond, le plus douloureux désir de mon cœur en ce qui me regarde c’est de vous revoir tous, de revoir votre pays, de reposer dans cette terre où j’ai tant souffert et tant espéré pour la France, d’y attendre la résurrection, comme j’y ai attendu la victoire ».

La Libération

Il continue de poursuivre une vie errante (Bernanos a déménagé une trentaine de fois dans sa vie) après la Libération.

Le général de Gaulle, qui l'a invité à revenir en France ({{Citation}}, lui fait-il savoir dans un câble daté du 16 février 1945), veut lui donner une place au gouvernement. En dépit d'une profonde admiration pour lui, le romancier décline cette offre. De Gaulle confiera plus tard, à propos de Bernanos : {{Citation}}.

Pour la troisième fois, on lui propose alors la Légion d'honneur, qu'il refuse également. Lorsque l'Académie française lui ouvre ses portes, il répond : « Quand je n'aurai plus qu'une paire de fesses pour penser, j'irai l'asseoir à l'Académie .

Lors de son retour en France, Bernanos est, en fait, écœuré par l'épuration et l'opportunisme qui prévaut à ses yeux dans son pays. N'ayant pas l'échine souple, il reste en marge. Il voyage en Europe pour y faire une série de conférences, dans lesquelles il alerte ses auditeurs, et ses lecteurs, sur les dangers du monde de l'après-Yalta, de l'inconséquence de l'homme face aux progrès techniques effrénés qu'il ne pourra maîtriser, et des perversions du capitalisme industriel (voir La Liberté pour quoi faire ? et La France contre les robots, 1947).

Dialogues des Carmélites

Bernanos part pour la Tunisie en 1947. Il y rédige, sur l'idée du père Bruckberger, un scénario cinématographique adapté du récit La Dernière à l'échafaud de Gertrud von Le Fort, lui-même inspiré de l'histoire véridique des carmélites de Compiègne guillotinées à Paris sur la place du Trône, le 17 juillet 1794, auquel la romancière avait ajouté le personnage fictif de Blanche de la Force (translittération de von Le Fort). Bernanos y traite de la question de la Grâce, de la peur, du martyre.

Bien plus qu'un scénario, Dialogues des carmélites est considéré comme le « testament spirituel de Bernanos ». Publié de façon posthume en 1949, il est d'abord adapté au théâtre par Jacques Hébertot et créé le 23 mai 1952 au théâtre Hébertot, avant de devenir le livret de l'opéra homonyme du compositeur Francis Poulenc, représenté en 1957 à la Scala de Milan.

Le scénario original a par la suite servi de base au film Le Dialogue des carmélites réalisé en 1960 par Philippe Agostini et le père Bruckberger, puis à un téléfilm de Pierre Cardinal en 1984 qui fut, entre autres, primé à la Cinémathèque française.

Georges Bernanos meurt d'un cancer du foie, en 1948, à l'Hôpital américain de Neuilly, en laissant le manuscrit d'un dernier livre, paru de façon posthume : La France contre les robots. Il est enterré au cimetière de Pellevoisin (Indre).

Il est le père de l'écrivain Michel Bernanos. Son fils cadet, Jean-Loup Bernanos (mort en 2003 et qui consacra sa vie à l'œuvre de son père), est aussi l'auteur d'une biographie (Georges Bernanos, à la merci des passants).

Postérité

Dans l'immédiat après-guerre, Georges Bernanos est devenu une figure tutélaire pour une nouvelle génération d'écrivains. Ceux que Bernard Franck a baptisé les Hussards ont ainsi placé dans leur Panthéon, parmi Stendhal, Joseph Conrad ou Marcel Aymé, celui à qui Roger Nimier dédia son livre Le Grand d'Espagne (La Table ronde, 1950), dont le titre est une allusion et un hommage à la position iconoclaste que Bernanos adopta face à la Guerre d'Espagne, à rebours de celle de son ancienne famille intellectuelle et politique.

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