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Pierre-Jakez Hélias est issu d’une famille de paysans pauvres du Pays Bigouden. Après leur mariage, son père, Pierre-Alain Hélias, de Plozévet, et sa mère, Marie-Jeanne Le Goff, de Pouldreuzic, se sont installés à Pouldreuzic, dans la maison du grand-père maternel, Alain Le Goff (mort en 1934), cantonnier, qui joue un rôle important dans l'éducation de son petit-fils. Son autre grand-père, Alain Hélias (mort en 1931), sabotier, est moins présent, mais a aussi une influence car il est un « conteur merveilleux » ; à quinze ans, Pierre-Jakez transcrit (en breton) plusieurs de ces contes.
Pierre-Jakez passe son enfance dans un milieu bretonnant : le français, langue de l’école et de l’état civil, n’est pas utilisé dans la vie courante. Il ne commence à l’apprendre qu'en entrant à l'école primaire (publique) ; sans renier sa langue maternelle, il se prend d'affection pour cette nouvelle langue. Dans sa famille, le français est tout de même connu de ses grands-pères (Alain Le Goff a fait son service militaire à Kairouan) et de ses parents : son père a fait son service militaire (à Vannes, au 35° d'artillerie), puis la guerre pendant quatre ans ; sa mère le connaît assez pour écrire des lettres en français. Il a aussi des oncles qui vivent à Rennes et à Paris (Pierre-Jakez fait un séjour à Paris chez l'un d'eux en 1926, et un autre en 1929), dont certains mariés à des non bretonnantes.
Avant son mariage, Pierre-Alain Hélias était un « grand valet » (mevel braz), un second d'exploitation en fait ; après la guerre, durant laquelle il a appris à conduire les poids lourds, il devient bûcheron et conducteur à la scierie du village, plus ou moins contremaître de l'entreprise. Sur le plan politique, il fait partie du clan des « rouges », c'est-à-dire des républicains radicaux qui soutiennent le député Albert Le Bail. Cela n'empêche pas Pierre-Jakez de recevoir l'instruction religieuse habituelle.
Il a d'excellents résultats scolaires et, en 1925, est reçu au concours des bourses de lycée : il part faire ses études secondaires comme interne au lycée La Tour d'Auvergne de Quimper . En cinquième, vu ses résultats, il est réorienté de section moderne en section classique, mais dispensé de grec. Il passe le baccalauréat (Philosophie) en 1932.
Après le baccalauréat, il envisage d'entrer dans la vie active, mais à l'instigation d'un professeur, il part en classe préparatoire à l'ENS (Première supérieure) au lycée de Rennes (actuel lycée Émile-Zola), où il a pour condisciples Paul Ricœur et Pierre Hervé. Il choisit de faire lettres classiques et commence donc l'étude du grec ; c'est aussi à cette époque qu'il prend contact avec Pierre Le Roux, titulaire de la chaire de Celtique à Rennes et François Vallée, auteur d'un dictionnaire breton-français.
N'ayant pas envisagé d'accéder à l'ENS, il poursuit ses études supérieures à la faculté des lettres de l'université de Rennes, tout en étant surveillant d'internat, à partir de novembre 1934, d'abord au lycée de Pontivy, puis de Quimper (février 1935), puis de Saint-Brieuc (décembre 1935). Durant cette période, il rencontre notamment Max Jacob à Quimper et Louis Guilloux à Saint-Brieuc. Il retrouve Rennes en 1936 et obtient sa licence, puis fait un diplôme (1938). Parallèlement à ses études, il est président de la Corporation des étudiants en Lettres et a une action syndicale en direction des surveillants d'internat, rédigeant une feuille d'information L'Avant-garde universitaire ; il s'intéresse aussi au théâtre. En août 1937, par l'intermédiaire d'Albert Le Bail, il rencontre Jean Zay venu inaugurer un monument à Plozévet ; par la suite, Jean Zay le recommande à Léo Lagrange comme auteur de textes pour les Auberges de Jeunesse. Pierre-Jakez collabore un moment à la revue Viens avec nous et dirige des auberges (à Paramé, puis en forêt de Brocéliande).
Après son diplôme, il entre dans l'enseignement à la rentrée 1938.
En 1939, il est mobilisé, fait ses classes à Vannes, puis est envoyé à l'école des officiers d'artillerie à Fontainebleau ; en juin 1940, l'école est évacuée avant l'arrivée des Allemands et il est démobilisé en Haute-Vienne, puis rentre à Rennes. Durant la guerre, il est professeur à Rennes, puis à Fougères, où il participe à la résistance. Durant cette période, il a l'occasion de rencontrer Jean Vilar et Jean Guéhenno. Après la Libération, il est un moment rédacteur en chef du journal du MLN, Vent d'Ouest, dont le directeur est Pierre Héger.
{{refnec}} à sa retraite en 1975, il est professeur de lettres à l'École Normale de Quimper ; en 1974, il obtient l'agrégation de Lettres modernes au tour extérieur, sans passer les épreuves. Dans les années 1970, il est aussi chargé de cours de celtique à l'université de Bretagne occidentale.
Au sein de la Ligue de l'enseignement, il est membre de la commission Théâtre de 1946 à 1954, se trouvant alors très proche du TNP et de Jean Vilar ; en 1954, il devient membre de la Commission Folklore, succédant à Paul Delarue et avant Robert Lafont, participant à des actions en France, mais aussi en Afrique (stage de 1958 à Abidjan). Une conséquence de ce stage est une maladie qui le met en congé pour une longue période
En 1946, il est chargé, avec Pierre Trépos, de relancer les émissions de radio en langue bretonne, mission qu'il assumera jusqu'en 1960 à raison d'une émission par semaine (de seulement une demie heure), écrivant des sketches et des pièces de théâtre.. La première a lieu le 21 décembre 1946. Lui et Pierre Trépos créent rapidement deux personnages récurrents, Jakez et Gwilhou. Au bout d'un an, il obtient les moyens de faire des reportages, ce qui lui permet d'accumuler un matériel ethnographique important. Un peu plus tard, il prolonge l'émission de radio en participant à des rencontres avec les auditeurs.
Cofondateur du festival de Cornouaille en 1948, il en est {{refnec}} le conseiller et l'animateur. Pour le festival, il est amené à écrire plusieurs pièces de théâtre, ainsi que des manifestes à l'occasion de certaines difficultés.
Membre des associations Ar Falz et Emgleo Breiz, il se tient à l'écart des mouvements nationalistes bretons et vit avec pragmatisme sa double appartenance culturelle, enseignant le français et écrivant dans les deux langues.
Durant son congé maladie, il est sollicité par Ouest-France pour tenir une chronique hebdomadaire, d'abord dans l'hebdomadaire La Bretagne à Paris, puis dans le quotidien. Il s'agit d'une chronique bilingue (français-breton), pour laquelle il utilise le matériel accumulé lors des reportages radiophoniques, et dont il fera la matière de ses premiers grands livres. Il est possible de consulter en ligne, sur la bibliothèque numérique du CRBC, les manuscrits de plusieurs de ces chroniques ayant servi à la rédaction du premier chapitre « Comme père et mère » du Cheval d’orgueil.
Le Cheval d'orgueil est écrit à la demande de Jean Malaurie et publié en 1975 : ce récit de son enfance lui vaut une célébrité nationale. En 1977, il publie Les Autres et les miens, recueil de contes, puis des romans en français. Sa poésie en breton, dont il effectuait presque toujours une traduction française est d'une grande qualité (Maner kuz – Manoir secret, 1964 ; Ar Mên du – La Pierre noire, 1974 ; An Tremen-buhez – Le Passe-vie, 1979 ; Amsked, Pobl an noz – Clair-obscur, Le Peuple de la nuit, 1990). En 1971, il participe aux premières émissions de télévision en breton Breizh o veva (« Bretagne vivante »).
En 1990, il prolonge Le Cheval d'orgueil par Le Quêteur de mémoire qui concerne sa vie d'adulte et évoque à partir de là les problèmes de la culture bretonne.
En 1991, il est décoré de l'ordre de l'Hermine.